Dimensions et
particularités fonctionnelles syntaxiques de la position de
l’adjectif épithète en français contemporain
Thierry
Trubert-Ouvrard
Université
Seinan
Gakuin (Japon)
trubert@seinan-gu.ac.jp
in Actes du Colloque L’Adjectif
en français et à travers les langues, Caen, juin 2001.
Résumé
:
Summary:
1. Introduction
Dans
cette
contribution, nous nous proposons de tenter de corréler
deux hypothèses complémentaires sur la position de
l’adjectif épithète dans le
groupe nominal en français. La première hypothèse
de travail relèvera de
l’ordre de la catégorie : la valeur sémantique du
nom, dans la suite
nom/adjectif, se trouve restreinte ou sous-catégorisée
par l’épithète
(contrairement au cas avec l’épithète anaphorique dans la
suite adjectif/nom
qui ne crée pas de sous-catégorie au nom). La seconde
hypothèse interrogera la
fonction énonciative des suites adjectif/nom et
nom/adjectif ; on y
observera la neutralité de l’énonciateur ou son
retranchement derrière la
présupposition dans la suite adjectif/nom, alors que dans la
suite nom/adjectif
sera principalement remarquée la modalisation de
l’énoncé par l’énonciateur, ce
que nous appellerons le « marquage
énonciatif ». Parallèlement à ces
analyses, nous ferons quelques remarques descriptives d’ordre
lexicométrique.
On
considèrera tout d’abord à la suite de Martin
Riegel
|
[que] les adjectifs sont des concepts descriptifs dont les occurrences se réalisent quand elles sont supportées par quelque chose qu’elles caractérisent et dont elles présupposent l’existence.[1] |
En
effet,
épithète anté- ou postposée,
l’adjectif est syntaxiquement et sémantiquement dépendant
du référent
particulier qu’il caractérise. Mais ces adjectifs, qui sont des
« concepts
descriptifs », peuvent surtout recevoir des
particularités fonctionnelles
syntaxiques très différentes selon leur place dans le
groupe nominal, comme
nous l’évoquions précédemment.
2.
Sous-catégorisation du nom par la position de l’adjectif
Nous
éliminerons dès à présent les cas de
différences sémantiques bien connues entre la
postposition et l’antéposition
nominales de l’adjectif, comme dans les deux énoncés
suivants qui illustreront
par eux-mêmes cette distinction. Nous nous arrêterons donc
pour n’en citer
qu’un exemple, celui de l’adjectif « ancien ». En
antéposition
nominale (1) il signifie généralement
« ex » ou
« révolu » ; en revanche dans le cas
de la postposition (2) il signifie
« vieux - mais qui demeure toujours » ou
« de longue
date ».
(1) |
Décidé
par les Parisiens et non pas décidé par l’ancien
maire. |
(2) |
Philippe Séguin a rappelé « une amitié ancienne et jamais démentie entre nos deux pays ».[2] |
Cependant,
l’épithète « ancien » qui
généralement conserve selon sa position
cette dichotomie sémantique observable dans les deux
énoncés ci-dessus - sauf
quand il est gradué par « très » -
peut aussi se placer en position
anténominale et sans graduation d’intensité avec le sens
« de longue
date » (3) comme dans les suites nom/adjectif.
(3)
|
Et très précisément mon arrière-arrière-arrière-arrière-arrière grand-père, ce que Kaufman a fini par découvrir au cours de ses recherches. Il m’a donc contacté, et, à sa demande, j’ai retrouvé quelques anciens documents de famille qui devraient permettre d’identifier avec certitude l’homme trouvé au Colorado.[3] |
On
remarquera que la différence de catégorie
sémantique n’est plus de mise dans
cet énoncé et qu’ « ancien »
signifie bien « de longue
date » : les documents n’ont pas jusqu’à ce jour
perdu de leurs
propriétés. Il est signifiant d’observer que
« de famille » pousse à
l’antéposition de l’épithète ; ainsi (3a) est
beaucoup moins acceptable
que l’original.
(3a) |
??Il m’a donc contacté, et, à sa demande, j’ai retrouvé quelques documents anciens de famille qui devraient permettre d’identifier avec certitude l’homme trouvé au Colorado. |
Cependant,
si l’on supprime le complément de nom et que l’on opère
une transformation dans
l’ordre des mots entre adjectif/nom et nom/adjectif, voir (3b) et (3c),
les
deux énoncés paraissent sémantiquement identiques,
avec cependant une
modalisation possible dans « documents anciens »
dans lequel
l’énonciateur accentuerait phonologiquement
l’épithète, étant donnée la règle
d’intonation sur le dernier item de chaque groupe de mot en phonologie
du
français.
(3b) |
Il m’a donc
contacté, et, à sa demande, j’ai retrouvé quelques
anciens
documents qui
devraient permettre d’identifier avec certitude l’homme trouvé
au Colorado. |
(3c) | Il m’a donc contacté, et, à sa demande, j’ai retrouvé quelques documents anciens qui devraient permettre d’identifier avec certitude l’homme trouvé au Colorado. |
La
dimension
sous-catégorielle de suites
adjectif/nom préconstruites dans le discours comme
« petite fille »
ou « grand homme », et observée dans ces
pages avec « ancien
maire » et « amitié ancienne »,
n’apparaît plus dans la suite
« anciens documents ». En (3) le narrateur
indique que le héros
Mortimer a « retrouvé quelques anciens documents de
famille » :
« anciens » ici ne s’inscrit pas dans la
construction d’une
sous-catégorisation de la catégorie
« document » qui, celle, reste
intacte. L’épithète apporte uniquement une information
descriptive et
facultative à « document ». On observera
que l’adjectif
« anciens » peut être supprimé sans
affecter l’acceptabilité de
l’énoncé. L’épithète pourra
également être remplacée par une autre,
« vieux » par exemple. La glose en (3d) avec
prédication de
« retrouver quelques documents qui devraient permettre
d’identifier avec
certitude l’homme trouvé au Colorado » nous
éclaire sur cette
acceptabilité constante :
(3d) |
Mortimer a retrouvé quelques documents de famille qui, ici, accidentellement, se trouvent être anciens : sans doute mieux vaut-il qu’ils soient anciens pour permettre d’identifier avec certitude l’homme trouvé au Colorado, mais il n’est pas exclu également que des documents récents permettent d’identifier avec certitude l’homme trouvé au Colorado. |
Si l’on observe de
plus près (3c), il est
possible d’y déceler une ambiguïté
sémantique : soit l’énoncé est synonyme
de (3b), soit l’inversion suivante d’adjectif/nom en nom/adjectif fait
apparaître une nouvelle sous-catégorisation de
« documents » -
« documents anciens » - qui recatégorise
« documents » en
restreignant son sémantisme : (3c) pourra ainsi être
glosé en (3e).
(3e) |
Il m’a donc contacté, et, à sa demande, j’ai retrouvé quelques documents anciens, il m’avait en effet demandé spécifiquement qu’ils le soient (anciens) pour permettre d’identifier avec certitude l’homme trouvé au Colorado ; si ces documents n’avaient pas été anciens, ils ne l’auraient pas intéressé, il croit peut-être que seuls des documents anciens feront foi ou seront des preuves suffisantes dans l’identification certaine de cet homme trouvé au Colorado. |
Dans
cette
transformation en nom/adjectif,
apparaît une information nouvelle de type phase 1 dans
« documents
anciens » - nous faisons ici
référence à la terminologie
d’Henri Adamczewski et à ses travaux sur la notion des phases[4].
Cette nouvelle
information vient s’imbriquer
dans la prédication de « Mortimer a retrouvé
quelques documents ». La
glose de cette transformation fait apparaître l’apport d’une
information
modalisante sur les intentions du personnage, avec individualisation du
sujet
de la part de l’énonciateur.
Remarquons enfin qu’en
(3c), et selon la seconde acception sémantique proposée
ci-avant, le fait de
supprimer l’adjectif postposé transformerait le sens de la
prédication
« Mortimer a retrouvé quelques
documents » :
« anciens » n’est pas facultatif et cette
qualification constitue la
qualité requise à « documents » par
le sujet de la phrase
« il ».
Nota
bene : il s’agit bien
ici d’une transformation à
partir de (3b), et non pas à partir de l’énoncé
original (3).
3. Dimension
énonciative de la position de l’adjectif
Notre
seconde
hypothèse de travail porte sur la
fonction de la position nominale de l’adjectif sur le plan de
l’énonciation.
Observons au préalable les exemples
(4) et (5)
tirés de journaux de campagne de candidats à la mairie de
Paris pour les
Élections municipales de mars 2001 :
(4) |
Philippe
Séguin a souligné « la
responsabilité immense
des électeurs
et notamment de tous les électeurs qui ne se reconnaissent pas
dans l’hégémonie
socialiste ».[5] |
(5) | Bertrand Delanoë clôtura la soirée en montrant que les méthodes proposées par les mairies de gauche, en concertation avec les habitants […] seront mises en œuvre pour aborder les tâches qui attendent la municipalité que nous appelons de nos vœux ; la tâche est exaltante mais immense et il prit pour exemple l’immense gâchis qu’est aujourd’hui les Halles pour illustrer son propos.[6] |
Nous
notons bien
que ces deux énoncés sont écrits respectivement
par
les rapporteurs de deux journaux de campagne qui reprennent chacun les
propos
de leur chef de file. Notre intérêt se porte sur le fait
que le premier énoncé
offre la postposition de l’adjectif « immense »
alors que le second
son antéposition.
La
différence de position
d’« immense » ne semble pas tenir au
sémantisme des noms qualifiés,
en effet l’inversion dans chacun des deux énoncés est
possible et ne changerait
pas le sens de ceux-ci : « la responsabilité
immense des
électeurs vs.
l’immense responsabilité des
électeurs » dans le
premier cas et « l’immense gâchis qu’est aujourd’hui
les Halles vs. le
gâchis immense qu’est aujourd’hui les halles » dans le
deuxième. La
différence entre les deux énoncés semble
plutôt se situer sur le plan du
« marquage énonciatif » en ce qui concerne
la phrase de Philippe
Séguin : l’énonciateur prend à son compte
toute la responsabilité de son
discours en y ajoutant une information nouvelle qui apparaît plus
clairement
dans la glose en (4a).
(4a) |
Philippe Séguin a souligné que la responsabilité des électeurs lui apparaissait de toute évidence comme étant immense. |
En
revanche, le
second énoncé qui rapporte un
discours de Bertrand Delanoë, et qui utilise
« immense » en
antéposition à « gâchis »,
paraît emprunter à l’imagerie collective
des auditeurs du futur maire - et des lecteurs de son
journal de campagne - le préjugé
(existant ou
non, car là n’est pas la question) que « les Halles
est un gâchis
immense ». Ce fait est présenté comme
étant une réalité, ou du moins comme
un lieu commun chez les Parisiens. Il ne s’agit pas là pour
l’énonciateur de
porter un jugement sur l’échec ou sur le succès des
Halles, mais de présenter
cet exemple comme la simple reprise - ou comme si
c’était
la simple reprise - d’une idée
reçue ou déjà
admise par tous. En utilisant l’antéposition le
rapporteur-énonciateur inscrit
l’énoncé dans la réalité. On ne manquera
pas de noter dans ses propos la
locution « pour exemple » qui sert à
introduire cette idée présentée
comme une vérité ou un lieu commun.
Examinons
maintenant d’autres énoncés dont les
distinctions émanent des mêmes critères que ceux
précédemment mentionnés pour
« immense », avec des exemples tirés du
même corpus des Élections
municipales de 2001 à Paris. En (6) et (7) où
apparaît l’adjectif
« profond » en emploi épithétique,
l’inversion de position avant ou après le nom
« changement » de
l’épithète « profond »
n’entraîne pas de modification sémantique du
groupe nominal, sauf une différence d’intonation à
l’oralisation du texte qui,
elle, pourrait entraîner une modalisation ; notons cependant
que cette
modalisation est possible dans les deux cas. Le sens des deux groupe
nominaux,
en (6) « profond changement » et en (7)
« changement
profond », des deux énoncés est le
même ; « profond » y a
pour synonyme « radical ».
(6) |
Les Parisiens
attendent un profond
changement dans les pratiques
qui
prévalent depuis
trop longtemps à Paris. Redonner de la dignité à
notre ville, c’est d’abord
restaurer l’éthique publique par la transparence et la
concertation. |
(7) | Oui, à Paris l’alternance est désormais possible. Car jamais, les Parisiennes et les Parisiens n’avaient affirmé une telle volonté de renouveau pour la capitale. Seules, les forces du mouvement peuvent aujourd’hui y répondre avec la force et la loyauté indispensables : rassemblées, cohérentes, porteuses d’un projet clair et ambitieux, elles seront dignes du changement profond voulu par les citoyens.[7] |
Quelles
différences d’interprétation énonciative
peut-on relever entre « Les Parisiens attendent un
profond changement
dans les pratiques qui prévalent depuis trop longtemps à
Paris » et
« rassemblées, cohérentes, porteuses d’un
projet clair et ambitieux,
elles seront dignes du changement profond voulu par les
citoyens » ?
Ces deux énoncés rédigés par un même
auteur comportent une même entité :
« citoyen »/« parisien »
présentée par cet énonciateur en
tant que sujet demandeur de changement ; on remarquera d’ailleurs
que la
voix passive dans le deuxième énoncé
n’entraîne pas l’antéposition de l’épithète.
Dans le premier exemple l’énonciateur présente le mot
« changement »
comme étant naturellement qualifiable et qualifié de
« profond » dans
la situation contemporaine à cet énoncé puisqu’il
doit remplacer des « pratiques
qui prévalent depuis trop longtemps ». Ni le
locuteur Lyne
Cohen-Solal, ni les Parisiens, ne qualifient à titre personnel
ce
« changement » tant attendu de
« profond » :
« changement » est introduit comme s’il se devait
de l’être -
« profond » -
car il ne peut se définir qu’ainsi pour opposer une
discontinuité aux méthodes
politiques du maire sortant.
Dans le deuxième exemple en revanche, en (7) ci-avant, l’énonciateur associe son propre point de vue à celui du peuple parisien qui, du même coup, est introduit comme étant le départ de l’énonciation. L’énonciateur se fait le porte-parole des citoyens et émet l’idée que ce « changement » est à la fois voulu et qualifié de « profond » par les Parisiens (tout en prenant également à son compte cette qualification). L’énonciateur pose ainsi sa « marque » personnelle sur l’énoncé.
4. Aides
lexicométriques
À
partir
de ces deux occurrences présentant
toutes deux l’épithète « profond »
postposée au même nom
« changement », nous avons utilisé les
moyens lexicométriques mis à
notre disposition pour observer d’autres occurrences de cet adjectif en
fonction épithète mais avec des noms différents.
Dans une base de données que
nous avons compilée et qui comporte environ cent cinquante
millions
d’occurrences[8]
- occurrences
tirées
d’écrits journalistiques, d’essais, de fiction (romans,
nouvelles, pièces de
théâtre, scénarios de cinéma, etc.),
de dictionnaires, et d’écrits de
vulgarisation scientifique, tous à proportion égale -
nous
avons pu observer la fréquence dans le discours de la position
de l’adjectif
« profond ». Cette observation
lexicométrique a été rendue possible
grâce au logiciel Lexico 3 élaboré
à l’Université de Paris
III par l’équipe d’André Salem. Ce logiciel a
généré une liste de concordances
de tous les énoncés comprenant l’adjectif
« profond », en position
épithète seule.
Évoquons
brièvement la méthode de travail des
concordances : travaillant sur un corpus de cent cinquante
millions d’occurrences,
il s’avère bien sûr impossible de lire tout ce corpus et
d’en retenir toutes
les occurrences susceptibles de nous intéresser. Les
concordances offrent un
bref aperçu des énoncés : chaque ligne
constitue le point central dans la
phrase de l’objet du discours recherché.
Tableau 1 :
Extrait de concordances avec CHANGEMENT+PROFOND
rt
pour les États - Unis . Un changement profond s ‘ opère
alors , révélant un vinrent
à s ‘ affranchir . Un changement profond des structures
économiques te chines
pour les récoltes . Un changement profond de structure se
produit en An nt
nommé pour faire face à ce changement profond de
temporalité , cette nouvel ME
question . En matière de " changement profond des règles
du jeu économique le
en 1969 ne provoque pas de changement profond . Par conviction ,
Georges Po une
des principales causes du changement profond de style intervenu dans la
pe l
ait provoqué chez Sender un changement profond , et de là
est né le sentimen globe
ont déjà contribué à un changement profond
des mentalités et des culture erre
cuite , corresponde à un changement profond dans le domaine des
conceptio analyse
vont être soumis à un changement profond : l ‘ espoir en l
‘ avènement ire
, que nous veillions à un changement profond , à une
transformation intéri nt
deux étapes : d ‘ abord un changement profond dans le rapport
entre l ‘ hom nt
pas trente - cinq ans , un changement profond dans le rapport au
travail , Cette
découverte apportera un changement profond dans nos habitudes (
syn : EN s
de la guerre attendaient un changement profond , un autre avenir : ils
voula Rabin
. . . Ils attendent un changement profond
dans la position israélienne nt
dans la vie du cinéaste un changement profond : sa femme ,
Letizia , le qui ise
du XIVe siècle , connu un changement profond dans ses structures
sociales le
signe annonciateur d ‘ un changement profond
dans le langage de ces scienc s
continuent de craindre des changements profonds qui menaceraient leurs
privi téraire
subissait encore des changements profonds et
répétés , il s ‘ avéra au spect
nouveau , entraîna des changements profonds dans la conscience et
la psy ion
des Husserliana , et des changements profonds qu ‘ elle induit dans l ‘
id e
certaine continuité et des changements profonds ( Stargardt ,
1978 ) . De la il
fallait qu ‘ il y eut des changements profonds d ‘ abord dans la
société ru résentée
, pour lesquels des changements profonds aux textes prévus
étaient de rovoquent
d ‘ autre part des changements profonds dans l ‘ organisation des ar présenté
périodiquement des
changements profonds solidaires d ‘ orientations t
, rien n ‘ indique que des changements profonds seraient
décidés pour sortir ienne
semble montrer que des changements profonds sont en cours . M . Hachemi |
Tableau 2 :
Extrait de concordances avec PROFOND+CHANGEMENT
ère
Guerre mondiale entraîna chez lui un profond changement d ‘
attitude . D ‘ qui
signifiait , à bien des égards
, un profond changement d ‘ attitude . Il e
au sein des couches moyennes ; lent et profond changement dans la base
socia e
, il convient surtout de mentionner un profond changement dans la
sensibilit cas
de la Croatie a cependant marqué un
profond changement dans la vision de thique
teinté d ‘ Art déco . On verra un profond changement dans
les œuvres qu explosion
démographique a
accompagné le profond changement de la répartition ement
de résidence s ‘ accompagna d ‘ un profond changement de style :
à la vi forme
sérieuse qui ne passe aussi par un profond changement des
mentalités . / planning
familial , accompagnées d ‘ un
profond changement des valeurs dans u n
particulier , le plus souvent , sur un profond changement du
régime alimenta de
Hong Kong ) sont l ‘ illustration du profond
changement en cours . / SCIEN ance
de stabilité institutionnelle et de profond changement induit
par la " no t
de technologie . Dans un tel climat de profond changement , les
décisions co e
de Bourbon ( Louvre ) témoignent de ce profond changement par l
‘ ampleur du synthétiseurs
, ordinateurs . . . ) , un profond changement s ‘ est produit . La
conquête par Prithvi Narayan amena un profond changement social .
Les Gurkh re
. L ‘ exemple de Rome suscita vite un profond changement , une
réelle promo aka
et l’ Andhra Pradesh , a traduit de profonds changements . Dans ce qui
fut 73
votants est un signe annonciateur de profonds changements . De fait ,
les é SU
/ La vie littéraire connaît aussi de profonds changements
. L ‘ esprit de c à
venir seront sans doute le théâtre de profonds changements
" . La Chine et l on
imprévisible suscite actuellement de profonds changements . Peu
à peu , l ‘
|
(Nous
mentionnons qu’ont été retirées de la liste en
question toutes
les occurrences avec l’épithète apposée et mise
entre parenthèses ou entre
tirets.)
On
observe sur
le graphique 1 ci-après la courbe
de la fréquence de la position de
« profond » selon le nombre
d’occurrences ; c’est-à-dire qu’au fur et à mesure
du décompte et de
l’observation des exemples engendrés par le logiciel, on a
observé la fréquence
de la position anté- ou postnominale de l’adjectif. Cette
proportion évolue
selon le nombre des exemples pris en compte selon les lois
statistiques. La
courbe de fréquence se stabilise à partir de six cents
occurrences. La
statistique de cette courbe de la position de l’adjectif par rapport au
nom
nous apporte une information digne d’intérêt :
« profond » en
emploi épithétique
(avec le féminin et le
pluriel inclus évidemment) se place dans soixante-trois pour
cent des cas après
le nom. Cette proportion est suffisamment proche de la moyenne
(cinquante pour
cent) pour observer que son antéposition nominale n’est pas une
exception
modalisante.
Graphique 1 :
À
titre
comparatif, nous présentons ci-après
deux autres courbes de fréquence de position nominale
(respectivement celle de
l’épithète « immense » et de
l’épithète
« précaire ») ; la comparaison des
trois graphiques laisse
observer que, d’une part, les fréquences ne se stabilisent pas
toujours au même
nombre d’occurrences (six cents pour « profond »,
six cent cinquante
pour « immense », et quatre cent cinquante pour
« précaire »). La deuxième
observation est que toutes les trois se
stabilisent à partir d’un certain nombre d’occurrences. Enfin la
troisième
observation brute que laissent apparaître ces courbes est que la
fréquence de
la position anté- ou postnominale de l’adjectif diffère
selon l’épithète
(soixante-trois pour cent pour « profond »,
quatre-vingt-six pour
cent pour « immense », et quatre-vingt-quatorze
pour cent pour
« précaire »).
Graphique 2 :
Graphique 3 :
5. Conclusion
Nous
souhaitons
apporter à cette contribution
l’exemple d’un nouvel énoncé avec à nouveau
l’adjectif
« profond » :
(8) |
Épuisés,
assoiffés, le ventre creux, les soldats s’affalèrent
à même le sol, sombrant
instantanément dans une profonde
torpeur.[9] |
Le
narrateur
antépose l’épithète
« profonde » à
« torpeur » dans « dans une profonde
torpeur ». L’énonciateur ne fait ni porter un
jugement personnel ni
n’apporter une information nouvelle - comme ce serait le cas
avec « dans une torpeur profonde » où le
narrateur insisterait sur la
qualité de la torpeur, et ce déjà par l’intonation
finale à l’oralisation. En
fait, « dans une profonde torpeur » reprend, dans
une suite logique
préconstruite par la narration, l’information sur la situation
des soldats
britanniques. Celle-ci a déjà été
annoncée au début de la page par l’image et
par la narration :
|
une vingtaine de rescapés,
troupes britanniques
en déroute, erraient, à la nuit tombante, incapables de
s’orienter,
exténués [ainsi qu’au début de la
phrase qui nous intéresse:]
Épuisés, assoiffés, le ventre creux,
les soldats s’affalèrent à même le
sol [information illustrée par l’image-contexte] . |
Cet
énoncé est sans
doute à différencier des précédents car la
suppression de l’adjectif rend
l’énoncé inacceptable. Nous observons donc ici le
rôle-clef de l’adjectif
épithète dans le groupe nominal et dans la syntaxe,
particularités que nous
avons voulu nuancer précédemment selon
l’antéposition ou la postposition
nominale. Sur le plan structurel, cet énoncé avec
« profonde
torpeur » ne se place pas sur le même plan que les
précédents observés
dans ces pages.
Nous
avons
tenté d’expliciter le distinguo des
suites adjectif/nom et nom/adjectif dans une perspective
catégorielle et
énonciative éclairant certains cas d’antéposition
et de postposition
adjectivale. Nous notons bien que l’inverse des suites était
souvent possible,
avec cependant une différence sur le plan du marquage
rhématique de
l’énonciateur ou de la présupposition thématique
des éléments du discours. Avec
l’antéposition de l’adjectif, l’énonciateur ne modalise
pas mais présente son
discours comme étant déjà inscrit dans la
réalité, et préconstruit ; il se
retranche derrière cette catégorie. Avec la postposition
de l’adjectif, c’est
un jugement qu’il prend à son compte, une information nouvelle
qu’il pose et
inscrit dans son discours.
* * *
Références
bibliographiques
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linguistique de l’anglais, Armand Colin, Paris.
Goes
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Entre nom
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grammaticale,
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Yaguello
M. (1998), Petits
faits de
langue, Seuil, Paris, 153 p.
[1] Riegel 1993, 5-10.
[2] Extraits d’une profession de foi du RPR pour les Élections municipales de mars 2001 à Paris ; c’est moi qui souligne.
[3] Exemple tiré de L’Étrange Rendez-vous, bande dessinée de Jean Van Hamme et Ted Benoit, 2001 ; c’est moi qui souligne.
[4] Adamczewski 1982.
[5] Extrait du journal de campagne du RPR pour les Élections municipales de mars 2001 à Paris ; c’est moi qui souligne.
[6] Extrait du journal de campagne du PS pour les Élections municipales de mars 2001 à Paris ; c’est moi qui souligne.
[7] Extrait de la profession de foi de Lyne Cohen-Solal pour les Élections municipales de mars 2001 à Paris dans le cinquième arrondissement ; c’est moi qui souligne.
[8] Nous appelons sous le terme d'« occurrence » tout mot ou unité lexicale.
[9] Exemple tiré de L’Étrange Rendez-vous, bande dessinée de Jean Van Hamme et Ted Benoit, 2001 ; c’est moi qui souligne.