QUELLE PLACE
POUR LE COURS DE CONVERSATION ?
Laurence CHEVALIER
Thierry TRUBERT-OUVRARD
© Université Seinan-Gakuin, 1996
in Études de Langue et Littérature françaises de l'Université Seinan-Gakuin, numéro 35, hiver 1996, ISSN 0286-2409.
[Pour
une définition du cours de conversation][Comment et quoi faire ?][L'évaluation]
Le
cours de conversation est un enseignement
important car il est le seul à s'intéresser directement
à
l'évaluation de la compétence communicative orale de
l'apprenant.
Or son statut reste encore imprécis dans le contexte actuel de
l'enseignement
des langues étrangères voire délaissé : il
est
généralement attribué à des enseignants
inexpérimentés
et nous remarquons une importante lacune en publications sur le sujet.
Pourtant,
comme les média, les séjours linguistiques et les
rencontres
des apprenants avec des Francophones, le cours de conversation permet
de
relier l'étude de la langue française avec sa pratique et
son utilisation.
Le besoin s'impose donc de réévaluer le cours de
conversation
aux yeux des apprenants et surtout des enseignants de facultés
et
d'écoles de français, les uns comme les autres respectant
essentiellement l'écrit, l'oral gardant la seconde place.
De plus, la mondialisation de la communication par l'anglais ou par
d'autres
langues véhiculaires comme l'espagnol ou même le
français
pourrait être dans l'avenir un facteur de redistribution des
objectifs
d'enseignement. En effet il n'est pas insensé de prévoir
que
les progrès informatiques en traduction et interprétation
transformeront les tendances de motivation pour apprendre une langue
étrangère,
passage de l'utile vers l'agréable. Selon une étude
très
récente (datant de 1996) du Ministère français de
l'Education,
le but d'apprendre pour le plaisir, et non plus pour le travail, va
grandissant.
Chez les apprenants, on constate une volonté de pouvoir utiliser
immédiatement leur savoir acquis dans les situations de la vie
quotidienne.
Le cours de conversation fait partie des enseignements qui
répondent
à cette attente.
Nous exposerons dans ces pages les besoins d'une définition du cours de conversation et ses spécificités dans le contexte pédagogique ; nous nous pencherons également sur les manières possibles de construire le cours et d'évaluer les apprenants.
I. Pour une définition du
cours
de conversation
Le
cours de conversation est le plus souvent
assuré par un enseignant francophone, à raison d'une
séance
par semaine, obligatoire ou non pour les étudiants. La constance
presque systématique avec laquelle il est confié aux
soins
d'un francophone indique en soi un des objectifs du cours : confronter
les
apprenants avec une certaine réalité de la langue
française,
les immerger le temps d'une séance dans une sorte de mini-bain
linguistique
que seule la présence d'un professeur natif rendrait plausible
et
possible.
Ceci dit, le cours peut prendre des formes extrêmement diverses
selon
les lieux d'enseignement. Il arrive qu'il ne diffère aucunement
des
cours de langues, sinon par l'intitulé et la présence
d'un
enseignant francophone.
Dans un autre cas de figure, il ne se donne pas pour but d'enseigner de
nouveaux éléments grammaticaux ou de transmettre quelque
savoir
académique, ce qui lui vaut souvent la réputation de
manquer
de sérieux : en comparaison des autrescours, son contenu semble
plus
léger, voire futile. L'utilisation d'activités ludiques,
qui
permet, entre autre, de détendre l'ambiance de classe, ne fait
que
renforcer cette réputation, à laquelle souscrivent
beaucoup
d'étudiants et d'enseignants. En bref, le cours de conversation
est
dans ce cas considéré comme un cours
récréationnel
sur lequel on arrête peu son attention ; à cet
égard,
il est assez significatif qu'il soit confié la plupart du temps
à
des lecteurs ou des professeurs débutants.
Enfin, il est aussi parfois considéré comme un appendice
du
cours de langue, dédié particulièrement à
l'oral
et à la révision, solution intermédiaire entre les
deux situations précédentes.
Raisonnablement, on peut attendre du cours, comme l'intitulé
l'indique,
qu'il entraîne les apprenants à tenir une conversation.
Mais
il s'agit là d'une tâche si vaste au vu de tout ce que ce
mot
conversation peut impliquer qu'il est à peine
exagéré
de qualifier ce cours d'un potentiel fourre-tout.
Précisons
aussi que, s'il existe quantité d'ouvrages pour guider
l'enseignant
dans les cours de langue, de littérature ou de civilisation, il
n'en
existe à notre connaissance aucun à l'intention du cours
de
conversation, mis à part ceux proposant exclusivement des
activités
ludiques*1, ce qui nous semble trop restreint. Le
cours de conversation apparaît
donc comme un domaine non-jalonné où le problème
qui
se pose est celui de l'ampleur du champs d'application inhérent
au
terme de conversation..
(1) C'est le cas de deux ouvrages : Jeu, langage et créativité et Jeux et activités communicatives dans la classe de langue, (voir la bibliographie à la fin).
Afin
de mieux cerner ce que le cours de
conversation pourrait être, définissons tout d'abord le
terme
de conversation. Le dictionnaire Robert propose la définition
suivante
: échange de propos naturel et spontané. Une
question
s'impose alors : peut-on obtenir cela en cours ? N'y aurait-il pas
contradiction
intrinsèque entre les mots cours et conversation
?
Un échange de propos naturel et spontané exige une
situation
qui le soit autant, or le cours peut difficilement prétendre
être
un lieu où la situation de communication soitnaturelle, du moins
à chaque cours et pendant toute sa durée. N'est-il donc
pas
illusoire d'attendre des apprenants qu'ils produisent
spontanément
une conversation en français dans un contexte qui ne l'est pas,
en
dépit de la présence d'un enseignant francophone, et donc
où l'utilisation du français n'est ni naturelle, ni
spontanée
? Cette remarque apparaît d'autant plus pertinente dans les pays
géographiquement
et culturellement éloignés de la France.
Essayons de déterminer précisément où se
situent
les contradictions entre cours et conversation. La
conversation
constitue, même si l'on parle parfois pour ne rien dire, un acte
de
communication. Selon les définitions généralement
admises
dans la didactique des langues, la communication fait intervenir en
même
temps les compétences verbale, culturelle et kinésique.
Cette
compétence de communication est à priori le but
recherché
de tout cours de langue se réclamant de l'approche
communicative.
A ce stade n'apparaît aucune contradiction, mais un oubli : le
spontané nécessaire à l'acte de communication
qu'est
la conversation. Il semble que la didactique des langues ne prenne pas
en
compte la dimension interactive entre les partenaires, ou bien la
considère
comme allant de soi. Or, on sait grâce aux travaux de la
linguistique
énonciative que dans tout acte de communication le locuteur est
toujours
en relation avec un autre partenaire. Outre la compétence
verbale, c'est la situation de communication qui prend ici toute son
importance.
Dans sa Grammaire du Sens et de l'Expression, Patrick Charaudeau*2
propose
de prendre en compte dans la définition d'une situation de
communication
les caractéristiques physiques des partenaires et du canal de
transmission,
les caractéristiques identitaires des partenaires et les
caractéristiques
contractuelles. Il en dégage deux types de situation de
communication
: d'une part la situation interlocutive où les partenaires sont
présents,
l'échange, oral, et le locuteur, à la merci de
l'interlocuteur
; d'autre part la situation monolocutive, avec un contrat de
non-échange
où le locuteur ne perçoit pas immédiatement les
réactions
del'interlocuteur, ce qui permet au locuteur de réfléchir
et d'organiser son discours, et pour laquelle la transmission est orale
ou graphique. Bien entendu, ces deux types de situation ne sont pas
hermétiques
et peuvent s'entrecroiser.
(2) CHARAUDEAU (Patrick) : Grammaire du sens et de l'expression, Hachette, 1992, pp. 633 à 645.
Partant
de cette analyse, il apparaît
clairement que la situation de communication d'un cours est sur
certains
points très différente de celle d'une conversation.
Tout d'abord, dans une situation de cours, une grande partie de la
séance
repose sur un contrat qui n'admet pas l'échange et aboutit
essentiellement
à une situation monolocutive. Cela est évident lorsque
l'enseignant
explique, donne des consignes, corrige, évalue, etc. Cette
situation
reste aussi la même lorsque les étudiants répondent
en classe aux questions d'un exercice préparé au
préalable
: ils ont disposé d'un temps de réflexion pour
élaborer
seuls leur discours qu'ils ne font que rapporter. La situation devient
interlocutive
seulement si le professeur pose des questions directes et
non-préparées,
mais là encore les étudiants ont la possibilité
d'atténuer
cet interlocutif en se repliant sur leur manuel, leur cahier ou leur
dictionnaire
pour y trouver une réponse déjà organisée.
Il
peut bien sûr exister en classe des moments véritablement
interlocutifs
alternant avec des moments monolocutifs, mais ces derniers nous
semblent
de loin prédominants. Cela tient aussi au fait que les
caractéristiques
identitaires et les rôles de communication sont extrêmement
pré-définis, par les statuts professeurétudiant
d'une
part, et par le rapport enseignantapprenant d'autre part. La situation
interlocutive
dans le cas où l'étudiant est le locuteur et le
professeur,
l'interlocuteur, est en effet difficile à assumer puisque
l'étudiant
se trouve à la merci d'un interlocuteur supérieur
à
lui par son statut et ses compétences verbale et culturelle. De
plus
on attend de lui qu'il réponde par une production verbale
relativement
bien structurée et organisée, production plutôt
caractéristique
de la situation monolocutive. Il est donc compréhensible que
l'étudiant
essaye par plusieurs moyens d'échapper à la situation
interlocutive,
en s'octroyant un temps de réflexion qui va couper
l'interlocution,
ou en se référantà l'écrit, voire
même
en refusant de répondre.
Si on prend le cas d'une conversation quelconque, la situation est tout
autre. Elle repose uniquement sur un échange interlocutif
où
le locuteur est à la merci de l'interlocuteur par le
canal
de l'oral. Dès que l'échange interlocutif est
altéré,
la conversation est suspendue (exemple : quelqu'un qui ne répond
rien). Les rôles de communication et les caractéristiques
identitaires
sont extrêmement variables selon les partenaires en
présence.
Faire un cours de conversation reviendrait donc non pas à
transformer
le cours en une longue conversation, tâche souvent impossible,
mais
plutôt à passer sans cesse d'une situation à
l'autre,
tout en essayant de réduire graduellement le monolocutif au
strict
nécessaire. Au lieu de chercher à plonger
l'étudiant
d'emblée dans une situation interlocutive qui le
déstabilisera,
il semble préférable de procéder par
étapes,
en l'habituant petit à petit aux caractéristiques de
cette
situation. En effet, lors d'une conversation, les difficultés
rencontrées
par l'étudiant proviennent autant du fait de la situation que
des
diverses compétences (verbale et culturelle) demandées.
Le
cours de conversation va donc se distinguer
des autres cours sur certains points précis en vue de favoriser
la
situation interlocutive. Il faut souligner ici que cette
spécificité
le rend complémentaire aux autres cours et par là
même
contribue à mieux l'intégrer à un cursus où
il a souvent du mal à trouver sa place.
Dans le cours, il va sans dire que l'accent est mis sur l'oral, sans
pour
autant proscrire l'écrit qui peut souvent jouer un rôle de
déclencheur. L'absence de manuel, en revanche, nous paraît
absolument nécessaire, pour essentiellement deux raisons :
d'abord,
comme nous l'avons vu, la consultation du manuel coupe tout
échange
interlocutif, de plus, sans manuel, les étudiants sont
contraints
de mobiliser leurs acquis linguistiques. A cet égard, le temps
du
cours de conversation constitue sans doute un moment
privilégié
pour vérifier ces acquis ils le sont rarement sans le recours
à
des tests d'évaluation formative ou sommative. C'est pour les
étudiants
une occasion de s'auto-évaluer et de faire le point sur ce
qu'ils
devraient revoir de l'enseignement des autres cours.
Une des plus grandes particularités du cours réside
peut-être
dans la notion d'imprévu et de spontanéité, que
recouvre
la caractéristique locuteur à la merci de
l'interlocuteur
énoncée plus haut, et qui intervient à plusieurs
niveaux.
Lors d'une conversation, on peut glisser facilement d'un sujet à
un autre, être surpris par une réaction inattendue de
l'interlocuteur,
etc. autant de sources de malentendus et de panique pour l'apprenant.
La
conversation a ceci de déroutant qu'elle contient une forte part
d'imprévu auquel il faut faire face immédiatement. Or les
étudiants ne sont pas habitués à réagir en
français,
et même et surtout, pour bon nombre d'étudiants japonais,
à
réagir tout court, que ce soit pour des raisons
linguistiques
(peur de faire des fautes), culturelles (refus de se mettre en avant
par
rapport au groupe ou de contrer l'interlocuteur) ou plus personnelles
(timidité).
Une des premières nécessités sera donc d'amener
les
étudiants à intervenir d'eux-même. Il est certain
que
l'ambiance de la classe joue un rôle non négligeable :
détendue,
mais sans non plus tomber dans un excès laxiste, elle a plus de
chances
de faire surmonter aux étudiants leurs petits blocages et leur
timidité,
et à les faire s'exprimer plus librement sans crainte du
jugement
d'autrui. On n'insistera également jamais assez sur le fait,
maintes
fois démontré, qu'une classe peu nombreuse, ne
dépassant
pas la quinzaine d'étudiants, favorise considérablement
le
climat de confiance recherché, et que la disposition des tables,
en U ou en cercle, facilite le croisement des regards et les
échanges,
et permet de restreindre la différence de statut quelquefois
rédhibitoire
entre professeur et étudiants. Il ne s'agit pas ici pour
l'enseignant
de faire comme s'il devenait subitement un simple animateur voire un
copain de ses apprenants, ce qui génèrerait une
situation
en porte-à-faux, mais de se poser, du fait de sa
nationalité,
comme un médium entre eux et la langue cible, faute de quoi
lessituations
en cours resteraient confinées à des échanges
purement
scolaires contraires aux besoins du cours de conversation.
L'enseignant francophone possède de fait, on s'en
aperçoit,
un atout indéniable : celui de son origine. Cette constatation
peut
paraître évidente, mais elle reste cependant très
rarement
prise en considération par la didactique des langues,
particulièrement
par l'approche communicative qui ne se soucie que de centration sur
l'apprenant.
Or, si le professeur sait la mettre en avant, sa personnalité de
francophone peut elle-même jouer le rôle de
déclencheur
pour faire réagir les étudiants.
Indissociable de l'imprévu et de la spontanéité,
vient
s'ajouter l'aspect de l'immédiateté. La conversation
n'autorise
pas - ou très peu - de temps mort pour répondre. Les
étudiants
doivent s'entraîner à réagir immédiatement,
qu'ils
aient compris ou non. La présence de l'enseignant en tant
qu'interlocuteur
francophone peut être là encore déterminante. En
effet,
il représente un trait d'union vivant entre les
apprenants
et la langue cible. Les documents visant à introduire une
certaine
réalité dans la classe (cassettes audio et vidéo)
restent
malgré tout une présence virtuelle,
différée,
et que l'on peut manipuler à son gré, alors que le
professeur,
que l'on pourrait concevoir comme un matériau vivant pour
les étudiants, permet un rapport réel, actif et
immédiat
au français.
L'aspect de l'immédiateté peut aussi s'aborder dans un
premier
temps et plus facilement à l'aide d'activités ludiques
où
la rapidité entre implicitement dans la règle du jeu (cf.
exemples d'activités ci-après). Les activités
ludiques
présentent l'avantage certain de placer les apprenants dans un
rôle,
celui de joueur, qui enlève la plupart de leurs inhibitions
parce
qu'elles fixent des normes autres.
Ce français justement de la situation interlocutive n'est en
général
pas celui d'un discours logique et organisé : parce qu'il est
à
la merci de l'interlocuteur, le locuteur hésite, rectifie,
complète
ou revient sur ses mots, utilise des gestes, etc. Il serait alors
illusoire
d'attendre des étudiants une production verbale
structurée
et,à plus forte raison parce qu'ils sont apprenants, correcte au
regard de l'écrit. Les étudiants eux-mêmes
assimilent
assez systématiquement le français correct au
français
de l'écrit. Il convient donc d'insister particulièrement
sur
le fait qu'une expression et une compréhension approximatives
sont
tout à fait normales dans les situations interlocutives et
qu'elles
ne les pénaliseront pas. Nous touchons là le point
délicat
de l'évaluation de l'oral sur lequel nous reviendrons par la
suite.
Enfin, il reste à traiter la diversité des situations de
communication
de la conversation. Deux sortes de variations semblent possibles : soit
varier les rôles en demandant aux étudiants de prendre des
identités différentes définies par les divers jeux
de rôles proposés, soit demander aux étudiants de
se
construire une identité qu'ils garderont, et faire varier les
situations
et les événements dans lesquels les personnages
évoluent
(la simulation globale). Dans les deux cas, l'interaction se fera
essentiellement
entre les étudiants, l'enseignant restant en dehors des
simulations
en tant que maître de jeu et afin de ne pas les
déséquilibrer
en sa faveur.
Après avoir mieux cerné les compétences et le but
du
cours de conversation, et défini les spécificités
et
critères qui détermineront sa construction, il convient
maintenant
de s'interroger sur le contenu même du cours. On dispose
là
d'une grande liberté, mais quel qu'il soit, il devra être
pensé
et conçu selon une perspective interlocutive pour dynamiser la
communication.
II. Comment et quoi faire ?
L'organisation
du cours de conversation
est directement liée à la personnalité de
l'enseignant,
ainsi qu'au niveau linguistique des apprenants. La prise en
considération
du plaisir d'apprendre de ceux-ci ne doit pas non plus
être
laissée pour compte, aussi nous sommes nous penchés sur
l'apprenant,
ses désirs,et ce qu'il considère être ses besoins.
Des
enquêtes répétées dans les classes nous ont
révélé
ce que les apprenants attendent du cours de conversation ; nous
classons
leurs demandes sous deux rubriques : l'acquisition des
compétences
linguistiques, et celle des compétences culturelles. La
première
est dominée par une volonté d'avoir accès à
d'autres registres de langue que ceux enseignés dans les autres
cours
(expressions proverbiales, plus familières, ou même
gestuelles),
ainsi qu'à une approche lexicale thématique souvent
déterminée
par des projets de séjour dans un pays francophone (les
déplacements,
les achats et l'alimentation, l'hôtellerie et la restauration,
...
et même le langage de l'amour). La demande d'acquisition de
compétences
culturelles est plus diversifiée même si elle vise
beaucoup
la communication : elle concerne surtout une connaissance de la vie
quotidienne
en France (des questions d'actualité au tourisme en passant par
la
mode, la télévision, la cuisine ou l'éducation) et
s'intéresse donc beaucoup moins à la belle culture
qu'à la petite culture, c'est-à-dire à des
connaissances
relevant d'un enseignement moins académique et utilisable
immédiatement.
Nous ne croyons pas qu'il faille bannir telle ou telle demande sous
prétexte
qu'elle concerne directement d'autres cours : par exemple, la
littérature
contemporaine peut être utilisée comme médium de
conversation,
mais sous une forme autre que pendant un cours de littérature
(c'est-à-dire
pas d'étude littéraire mais l'utilisation d'un passage en
tant que base de discussion sur les idées émises ou
d'activités
sur la langue utilisée).
Connaître l'attente des apprenants nous semble digne d'un
intérêt
certain pour une approche plus détaillée du public
enseigné.
Il n'est cependant pas question de donner libre-cours à toutes
leurs
demandes du fait de leur nombre, parfois de leur impertinence, mais
aussi
parce qu'elles ne peuvent être complètement satisfaites
dans
le cadre du cours de conversation. En effet, ces demandes impliquent
apparemment
une attente passive de la part des étudiants : que
l'enseignant
discoure sur des thèmes culturels donnés, le danger
étant
de glisser vers le coursmagistral. Ces demandes émanent de ce
que
le cours de civilisation traite généralement de sujets
académiques
: les étudiants voient, dans le cours de conversation, plus
proche
d'une réalité quotidienne, l'occasion de connaître
mieux
les modes de vie et les rites sociaux. Comme nous l'avons
souligné
ci-avant, l'activité communicative met aussi en jeu des
éléments
culturels, qui devront être traités dans le cours de
conversation,
sans qu'ils en soient toutefois l'objet réel puisque ce
rôle
revient au cours de civilisation. L'utilisation de documents
authentiques
peut permettre l'introduction de certains traits culturels, tout en
restant
intégrés dans une activité communicative.
Nous mentionnons ci-dessous des exemples d'activités de
communication
dignes d'être utilisées en cours de conversation pour
satisfaire
aux critères exposés précédemment dans ces
pages.
Nous n'oublions pas cependant que l'approche communicative, avec son
souci
de centration sur l'apprenant, a trop souvent tendance à laisser
de côté les désirs et les goûts de
l'enseignant.
D'autre part, la personnalité de l'enseignant elle-même
joue
le rôle de déclencheur de communication, en ce sens que
les
étudiants seront intrigués par la personne enseignant et
chercheront
à la connaître mieux ce qui peut créer des
discussions
de type intimiste. Si tel est le cas, la communication débordera
souvent le cadre du cours : les étudiants vont dans le bureau de
l'enseignant pour bavarder et poser des questions personnelles.
Nous regroupons des activités de communication sous deux rubriques : en (1) Langue et culture et en (2) Créativité et spontanéité. Nous avons conscience que tout classement d'activités communicatives est fatalement réducteur, néanmoins cette division simple traduit une différence de niveau chez les apprenants : les activités créatives et imaginatives sont plus satisfaisantes chez les étudiants de niveau moyen et avancé qui prennent conscience de l'importance de la communication en tant que but réel du cours, alors que les faux débutants préfèrent des activités ludiques demandant une activité linguistique limitée ; il sont aussi moins eu l'occasion de recevoir un enseignement sur la culture française ou francophone et en sont très demandeurs.
1. Langue et culture
a)
Présentation des
apprenants
Cette activité est idéale en début d'année
car
elle permet une première approche conversationnelle simple aux
apprenants
tout en leurs permettant de se connaître et donc de cimenter le
groupe.
Grouper les élèves par couples et les laisser se
présenter
mutuellement pendant cinq minutes. L'enseignant leur aura auparavant
donner
des consignes sur la nature de leurs propos nom, habitat, goûts,
habitudes,
etc. et demander de prendre des notes en français (et non pas
des
phrases à lire), en effet chacun présentera son
partenaire
à la classe.
Cette présentation de l'autre offre un avantage sur la simple
présentation
de soi : se présenter à un seul interlocuteur permet de
surmonter
plus facilement sa timidité et la peur de s'adresser à un
groupe inconnu pour parler de soi.
b) Description
physique
L'enseignant devra par avance sélectionner des portraits
photographiés
tirés de publicités de revues. Au début du cours
il
enseignera comment présenter un sujet inconnu Il y a un homme et
une femme, etc. » ainsi que le vocabulaire de description
physique
(sexe, âge, visage, corps) et vestimentaire (vêtements,
couleurs,
formes, tailles, styles et motifs). Puis il invite tour à tour
au
bureau les étudiants à décrire à la classe
une
photo qui restera cachée des autres jusqu'à la fin du
cours
; l'enseignant montrera une à une les photographies pour que la
classe
décide qui a décrit quoi. Ce dernier exercice permet
à
chaque apprenant d'auto-évaluer le succès de son message
à
la classe.
c) Programme
des spectacles (document
authentique)
- Observation d'ensemble du document : " - Qu'est-ce que c'est ? -
Quels genres d'information puis-je y trouver ? " ; puis en
dégager
l'essentiel (le programme et non du parasitaire comme les
publicités).
- Etude plus détaillée : " Quelles sont les rubriques
? - les sous-rubriques ? ".
- Etudes par rubriques : " Quelles précisions puis-je trouver
? ".
Au fil de l'étude détaillée, les étudiants
remarqueront
des différences culturelles : par exemple que la majorité
des films à l'affiche en France est d'origine européenne
;
qu'il y a des séances tard le soir, que les films
étrangers
ne sont pas systématiquement en version originale
sous-titrée,
le prix des tickets de cinéma, de concert ou de
théâtre,
etc.
- Eventuellement, avec des étudiants de bon niveau, on peut
chercher
à quel genre de public s'adresse ce programme en étudiant
les publicités.
- Maniement du document (fonction utilitaire) : " Je veux aller voir
tel film/ concert/pièce de théâtre le soir à
telle(s) date(s) ". Cherchez toutes les possibilités et les
informations.
Jeux de rôle :
- (A effectuer par groupes de deux ou trois.) Vous décidez de
sortir
ensemble un soir. Fixez le jour, décidez de ce que vous allez
faire,
où et quand vous allez vous retrouver.
Actes de parole : proposer, suggérer, accepter, refuser, fixer
un
rendez-vous.
On peut faire trouver aux étudiants ou éventuellement
faire
compléter des expressions comme : " - Ça te dirait de...
? - Et si on allait... ? - J'ai entendu dire que (ce film était
très
bien,...). - J'ai très envie de... - Non, ça ne me tente
pas
tellement. - Je préférerais... - On pourrait..., etc.
"
- (A effectuer par groupe de deux ou trois.) En vous inspirant du
programme
de spectacles français, présenter un programme des
spectacles
de votre ville (à faire chez soi). Un étudiant travaille
à
l'accueil d'un office du tourisme, un autre vientd'arriver dans la
ville
(touriste, homme d'affaires, etc.) et voudrait sortir le soir. Il
demande
ce qu'il y a à faire, ce qui conviendrait à ses
goûts
et à son budget.
Actes de parole : idem, demande d'informations.
Nota bene : ce deuxième jeu de rôle est difficile
à
réaliser sur le document authentique car il suppose que les
étudiants
connaissent les spectacles proposés. Pour cette raison il est
préférable
de demander la préparation d'un programme propre à leur
ville.
En faisant ces deux jeux de rôle, l'enseignant peut
vérifier
si les registres de langue (familier pour le premier, poli pour le
second)
sont assimilés.
d) Annonces
immobilières (document
authentique)
Observation : " - Qu'est-ce que c'est ? - Comment est-ce classé
? ".
Traitement du vocabulaire et des expressions idiomatiques ;
repérage
des informations d'ordre culturel.
Revoir le vocabulaire de la maison et insister sur les
différentes
pièces.
Si on veut louer un appartement/une maison, quels sont les
renseignements
nécessaires à obtenir ? Formuler les questions.
(Attention
: à cause de différences culturelles, certaines questions
des étudiants ne sont pas pertinentes dans un contexte
français,
par exemple l'air conditionné.)
Etudier plus en détail les annonces. Faire remarquer les
abréviations,
les relever et faire deviner quels sont les mots d'origine.
En déchiffrant ainsi quelques annonces, on notera certaines
différences
culturelles (chauffage collectif, caution à verser, pas de
climatiseur,
appartements meublés, etc.)
Jeux de rôle :
- Vous cherchez un logement. Définissez vos besoins, votre
budget,
etc., puis relevez les petites annonces qui vous intéressent.
Vous
téléphonez pour obtenir plus de renseignements (par
groupe
de deux et en inversant les rôles).
Actes de parole : demande de renseignements, description
(caractère
utilitaire).
- Vous avez choisi votre logement et venez d'emménager. Vous
rencontrez
un(e) ami(e) qui vous demande comment est votre nouveau logement.
Décrivez-le
et dites-lui comment vous l'avez décoré.
Actes de parole : idem (caractère imaginatif).
Nota bene : les étudiants pourront réaliser, chez
eux,
un plan imaginaire de leur logement comme soutien pendant les jeux de
rôle.
2. Créativité et spontanéité
a) Renaissance
ou L'immeuble
Renaissance est une activité de simulation globale*3
où l'enseignant
propose à l'apprenant de renaître dans un individu
étranger
à son pays qu'il fera vivre le temps d'un cours.
L'étudiant
se construit une pseudo-identité et une pseudo-culture, et
développe
ainsi sa compréhension de la spécificité de
l'autre
l'activité peut être aussi élaborée en
faisant
vivre les personnages dans un immeuble de la ville française de
leur
choix . Avec cette activité l'apprenant est comblé dans
son
désir d'être apprenant de français et de se
valoriser
; il se choisira soit un personnage qu'il rêve d'être, soit
qui attire sa curiosité ou attise son imagination.
Préparation hors classe : chacun remplie une fiche individuelle
polycopiée
et distribuée par l'enseignant (nom, âge, origines,
état
civil, cohabitation, description physique, activité
professionnelle,
loisirs) ; ces fiches seront ensuite photocopiées pour que
chaque
apprenant possède un recueil complet du groupe, pour le
connaître.
De nombreuses activités sont possibles à partir de ce
projet
: discussions, questions sur la vie privée sans
indiscrétion
ni embarras puisque l'apprenant possède unmasque qui
protège
sa sensibilité. Ce projet permet d'introduire aussi des
éléments
de notions culturelles : choix du quartier, de l'origine ethnique des
locataires,
de leurs habitudes, etc.
(3) Cf. YAICHE (Francis) : Les Simulations globales, mode d'emploi, Hachette F.L.E., Paris, 1996.
b) Etude
de cas*4
Raconter une histoire polémique aux apprenants et
élaborer
un débat en groupant les différentes prises de position.
Exemple de récit : " Dans la maison A une jeune femme,
mariée
à un homme qui travaille beaucoup trop ; elle se sent
délaissée.
Un soir alors que son mari est encore parti en voyage d'affaire, la
jeune
femme rencontre un séducteur irrésistible qui l'invite
à
venir chez lui. Le séducteur habite en B, de l'autre
côté
de la rivière. La jeune femme cède et passe la nuit dans
la
maison B. A l'aube, elle se sauve : elle sait que son mari va
bientôt
rentrer. Hélas ! Le pont (C) est à présent tenu
par
un fou qui tue tous ceux qui tentent de le traverser. La jeune femme
fait
demi-tour et suit la rivière dans l'espoir de rencontrer un
passeur.
Elle le trouve en D, mais celui-ci exige cent francs pour gagner
l'autre
rive. La jeune femme n'a pas l'argent ; elle court chez son amant, lui
explique
la situation et lui demande les cent francs. L'amant refuse net. La
femme
se rappelle alors avoir un amoureux platonique qui habite en E ; elle
court
chez lui et explique son drame : son mari, le séducteur, le fou
et
le passeur. L'amoureux refuse de l'aider car elle l'a trop
déçu
dans sa conduite. La jeune femme part faire une ultime tentative
auprès
du passeur : il reste intraitable. Elle décide alors de tenter
de
passer le pont malgré le danger : elle s'élance, et le
fou
la tue. "
(4) Cf. Muchieli.
Méthode
:
Dessiner au tableau la géographie de l'histoire en s'aidant des
lettres
(A, B, C, D, E), lire celle-ci deux fois aux apprenants, et leur poser
la
question cruciale : " Parmi les cinq hommes le mari, le
séducteur,
le fou, le passeur et l'amoureux lequel est le plus responsable moralement
de la mort de la jeune femme ? ". La classeélabore un travail
de discussion et forme des groupes selon leur préférence
pour
le plus responsable. Chaque groupe devra présenter aux autres
une
argumentation soutenue pour défendre les personnages qu'ils
considèrent
moins responsables et établir la culpabilité de leur
personnage
(ou vice-versa).
c) Autour
d'une photographie (document
à
interprétations multiples)
- Description de la photographie d'une personne.
- Hypothèses : " - Où est-ce ? - Qui est-ce ? - Quel
âge a-t-il/elle ? - Que ressent- il/elle ?, etc. " ;
répondre
en justifiant à chaque fois.
- " - Que lui est-il arrivé ? - Imaginez ce qui s'est
passé."
; chacun imagine une petite histoire et la raconte.
Chaque apprenant trace quatre colonnes : noms, verbes, adjectifs et
adverbes.
Ecrire un mot pour chaque colonne directement inspiré de la
photographie
(sont exclus les noms d'objets présents sur la photographie).
Chercher
une demi- douzaine de mots par colonne par association d'idées
avec
le mot-titre. L'enseignant effectue au hasard une mise en commun au
tableau
(en respectant le même nombre de mots). Les étudiants
doivent
ensuite inventer l'histoire de la personne en utilisant tous les mots.
L'histoire
se construit d'étudiant en étudiant, jusqu'à
utilisation
complète de tous les mots et explication de la scène de
la
photographie.
Nota bene : le récit peut se faire indifféremment
au
présent ou au passé.
d) Alibi*5
Présenter un fait divers criminel (cambriolage, meurtre, etc.)
en
précisant l'heure approximative. Par exemple : Une vieille dame
a
été assassinée hier soir entre vingt heures et
vingt-trois
heures. ». Annoncer que toutes les personnes de la classe sont
suspectées
et que chacun sera interrogé sur ce qu'il faisait à
l'heure
du crime ; chacun a donc besoin d'un alibi. Les étudiants
forment
des groupes de deux ou trois ayant passé la soirée
ensemble
(composition de l'alibi). Laisser untemps de préparation aux
étudiants
pour construire leur alibi. Puis un des membres d'un groupe
donné
est interrogé par le reste de la classe pendant que le ou les
autres
membres sortent de la classe (ils ne doivent rien entendre avant
d'être
interrogés). Donner un temps limité de cinq minutes pour
les
questions. Le but du jeu est d'arriver ainsi à une contradiction
entre étudiants du même groupe, en leur posant des
questions
précises pour détruire leur alibi. Une fois chaque groupe
passé à l'interrogatoire, les coupables seront reconnus
comme
ceux ayant le plus mauvais alibi (ceux qui se sont contredits le plus).
Actes de parole : interroger avec précision, raconter sa
soirée
(questions et mots interrogatifs, temps du passé).
Rapidité de parole requise : les apprenants n'ont le temps de
préparer
ni leurs questions ni leurs réponses.
(5) Cette activité est présentée notamment dans : WEISS (François) : Jeux et activités communicatives dans la classe de langue, Hachette, Paris, 1983, p. 52.
e) Discussions
à thèmes
Lors de conversations générales à thème,
nous
recommandons un travail à partir d'un document concret pour
motiver
l'apprenant car partir d'un thème abstrait risque de n'aboutir
qu'au
mutisme de l'apprenant. Le langage abstrait étant difficile
à
employer, cette activité est à utiliser avec parcimonie
et
seulement avec des étudiants de niveau avancé. Le
thème
abordé doit pouvoir provoquer assez de réactions pour que
naisse un débat. Il faut donc qu'il soit connu de tous et
suscite
déjà des polémiques. Un sujet inspiré de
l'actualité
locale, ou bien de l'actualité internationale s'il a des
répercussions
suffisamment importantes dans le pays des apprenants, semble plus
à
même de déclencher une discussion qu'un sujet trop
général
et universaliste (type le racisme). La demande des
étudiants
est pour ce genre d'activité primordiale. Nous leur recommandons
aussi une préparation à la maison pour éviter dans
le cours des temps morts consacrés à la recherche du
vocabulaire
et des idées.
III. L'évaluation
Les
apprenants n'ont pas forcément
toujours conscience de ce que la conversation ou la communication met
en
jeu. Ils ont souvent tendance à la réduire à
l'aspect
verbal correct et à se focaliser uniquement sur la
compétence
grammaticale. L'enseignant se doit donc d'offrir aux étudiants
des
occasions de réfléchir sur la manière de
communiquer
et pour cela il convient d'insister particulièrement sur
l'importance
d'une expression et d'une compréhension approximatives, tout
à
fait propres à l'oral. Cela pose le problème de
l'évaluation
dans le cours de conversation qui est celui plus général
de
l'évaluation de l'oral. L'enseignant pourra préciser que
l'évaluation
prend en compte la quantité comme la qualité.
En ce qui concerne l'évaluation hebdomadaire en classe, il
existe
déjà des grilles*6 hélas trop complètes parce
qu'elles
prennent en compte un nombre infini de critères, pertinents
certes,
mais qu'il est dans la pratique impossible de remplir pendant le cours.
Moins difficile, F. Yaiche*7 propose différents panels de
grilles
d'évaluation adaptés à chaque activité
et
prenant en compte : les objectifs, les consignes et le savoir
grammatical,
avec des sections telles que le récit (complet, riche),
le
savoir (utilisation correcte des temps), le vocabulaire
(et
la prononciation), les bonnes répliques, les arguments,
le ton convaincant, etc.
(6) Exemple de grille d'évaluation :
Consigne |
||||||
Compréhension de la consigne | 0 | 1 | 2 | |||
Respect de la consigne | 0 | 1 | 2 | |||
Forme |
||||||
Phonétique : aucune erreur | 3 | |||||
Erreurs qui gênent un peu la compréhension | 2 | |||||
Erreurs qui gênent beaucoup la compréhension | 1 | |||||
Erreurs qui empêchent la compréhension | 0 | |||||
Prosodie | 0 | 1 | 2 | 3 | ||
Langue : Morphologie | 0 | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 |
Langue : Syntaxe | 0 | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 |
Lexique | 0 | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 |
Contenu |
||||||
Pertinence des actes de parole | 0 | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 |
Pertinence du point de vue présenté | 0 | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 |
Cohérence du discours présenté | 0 | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 |
Spontanéité dans l'expression personnelle | 0 | 1 | 2 | 3 | ||
Comportement non verbal | 0 | 1 | 2 | 3 | ||
Originalité | 0 | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 |
(7) YAICHE, p. 172, ibid.
Pour notre part, nous nous en tenons au système simple du nombre des croix pour apprécier la participation au cours du point de vue de sa quantité (nombre de prises de parole), et nous avons recours à une notation lettrée (A,B,C) pour évaluer la qualité de la prise de parole. Ce système permet de ne pénaliser ni les étudiants dont la compétence linguistique est moyenne ou faible mais qui participent activement au cours, ni ceux plus réservés mais dont la compétence linguistique est supérieure. Cependant, cette notation ne peut être totalementsatisfaisante au vu de la complexité de la production orale. Le système de grille évoqué précédemment nous parait intéressant, seule son application pratique fait défaut. Aussi une utilisation différente résout le problème : les grilles sont remplies par les apprenants eux-mêmes à chaque fin de cours, leur permettant ainsi une auto-évaluation. Voici le tableau que nous suggérons à cette fin :
Dates | |||
Nombre de prises de paroles | |||
Nombre de fois où vous avez voulu parler sans succès | |||
|
-
de 25% 25 à 50% 50 à 75% + de 75% |
-
de 25% 25 à 50% 50 à 75% + de 75% |
-
de 25% 25 à 50% 50 à 75% + de 75% |
Passez-vous par votre langue maternelle avant de parler en français ? | oui/non | oui/non | oui/non |
Préparez-vous vos phrases avant de parler ? | oui/non | oui/non | oui/non |
Parvenez-vous à exprimer tout ce que vous voulez dire pendant votre temps de parole ? |
-
de 25% 25 à 50% 50 à 75% + de 75% |
-de
25% 25 à 50% 50 à 75% + de 75% |
-
de 25% 25 à 50% 50 à 75% + de 75% |
Ce
tableau n'est pas destiné à
une notation précise de l'apprenant, mais peut aider
l'enseignant
à mieux repérer les difficultés des
étudiants.
Par exemple, un étudiant ne prenant pratiquement jamais la
parole
mais ayant inscrit qu'il voulait la prendre plusieurs fois sans
succès
a peut-être du mal à surmonter sa timidité ou est
moins
rapide que les autres. Il conviendra alors de lui donner plus
l'occasion
de s'exprimer. Cette formule permet à l'apprenant
réservé
d'être moins pénalisé.
Cette grille pourra être ramassée par l'enseignant une
fois
par mois pour juger dela progression et des difficultés des
étudiants,
et l'accorder avec l'évaluation effectuée par
l'enseignant
à l'aide des croix et des notes. La grille permet de
surcroît
à l'enseignant de remarquer quelles activités engendrent
le
plus de réactions, grâce aux entrées Nombre de
prises
de paroles et Nombre de fois où vous avez voulu
parlé
sans succès.
En ce qui concerne l'évaluation de fin de semestre ou
d'année
(quand elle est désirée ou requise), nous croyons qu'un
test
oral est nécessaire. Pour cela un écueil important est
à
éviter : celui de l'écrit oralisé. Nous avons
souvent
constaté cette déviation de la conversation dans
le
cas d'une préparation à faire, (jeu de rôle, etc.).
Selon le temps dont on dispose, le test oral peut se faire
individuellement
(avec l'utilisation d'un prompteur visuel, verbal ou non, pour
déclencher
une conversation entre l'enseignant et l'étudiant) ou par
groupes
de deux ou trois apprenants (grâce à l'improvisation d'un
mini-jeu
de rôle, dont le sujet n'est révélé qu'au
début
de l'examen mais restant en rapport avec la matière
enseignée
en cours).
Le test oral ayant pour but d'évaluer la compétence de communication globale, il ne saurait être confondu avec l'examen de compréhension orale des cours de langue celui-ci n'évaluant que partiellement la compétence communicative orale. En cela, l'évaluation pour le cours de conversation est spécifique : l'apprenant est en contact individuel avec l'enseignant et il exprime son aptitude à communiquer plutôt qu'à savoir.
Le
cours de conversation se distingue par
son objectif, sa construction et son évaluation. Il permet une
utilisation
de la langue cible qui le rend complémentaire des cours de
langue
et de civilisation. Il offre à l'apprenant, dans un premier
temps
un entraînement de la pratique orale de la langue, qui
débouche
ensuite sur une expérience francophone propre (interaction libre
etspontanée). A cette distinction s'ajoute celle de la
construction
et du déroulement du cours dont les techniques visent à
placer
l'apprenant dans une situation interlocutive, ainsi que les
caractéristiques
de l'évaluation. Le cours de conversation, tel que nous l'avons
défini,
occupe de ce fait une place unique et nécessaire dans
l'enseignement
de la langue.
Vues les difficultés mises en évidence dans ces pages, la
lacune en ouvrages sur le cours de conversation n'en est que plus
regrettable.
Aussi croyons-nous qu'il existe un besoin réel d'ouvrages
regroupant
des expériences diverses, dont l'objectif serait de pouvoir
accéder
aux multiples pratiques conçues par les enseignants des cours de
conversation.*
* Ces pages ont été inspirées à leurs auteurs par un double atelier qu'ils ont animé à l'Université Keio à Tokyo le 29 août 1996, dans le cadre du IXème Congrès Mondial de la Fédération Internationale des Professeurs de Français.
* * *
BIBLIOGRAPHIE
CARÉ
(J.-M.) et DEBYSER (F.) : Jeu,
langage et créativité, Hachette, Paris, 1991.
CHARAUDEAU (Patrick) : Grammaire du sens et de l'expression,
Hachette,
1992.
DISSON (Agnès) : Pour une approche communicative dans
l'enseignement
du français au Japon, Presses Universitaires d'Osaka, 1996.
WEISS (François) : Jeux et activités communicatives
dans
la classe de langue, Hachette, Paris, 1983.
YAICHE (Francis) : Les Simulations globales, mode d'emploi,
Hachette
F.L.E., Paris, 1996.